Le vin naturel, vous connaissez ? C’est une pratique de vinification qui prend à contrepied tous les standards existant du marché. La meilleure façon de préserver un goût authentique et les spécificités du terroir. Interview croisée entre deux passionnés du vin naturel, Baptiste Lardeux (Titulus) et Matthieu Vellut (Vin Naturel)
Le vin naturel, pour vous, c’est quoi ?
Baptiste (Titulus) – Pour moi, le vin naturel, c’est la volonté d’un vigneron de faire parler son terroir, l’idée que le vin se fera majoritairement dans les vignes plus que dans la cave. Que l’on interviendra le moins possible pour ne pas galvauder l’expression de ce même terroir, d’une vigne, de son âge de la nature de son sol, d’un millésime, du vigneron qui fera des choix dans la conduite de son vignoble et dans sa cave pour élever le jus en l’accompagnant au mieux, en le guidant pour que le résultat soit là… En bref, un « canon à boire » entre ami ou un grand vin qui sublimera son terroir et traversera les années.
Car pour nous, le vin naturel ne justifie pas non plus les défauts ou déviances, nous sommes des amateurs de vins aussi, en même temps et avant d’être des amateurs de vins naturels et même si le caractère vivant de ces vins ne doit jamais disparaître ou être chimiquement camisolé, il ne doit pas non plus partir en vinaigre, nous sommes bien d’accord!
Matthieu (Vin Naturel) – Les vignerons de vins naturels, plutôt rebelles, n’aiment pas être mis dans des cases. Pour faire simple, je dirais que le vin naturel va beaucoup plus loin que le bio. En fait, élaborer du vin à partir de raisins issus de l’agriculture biologique n’est pas suffisant. Le vin naturel, c’est du raisin bio et donc une vigne non traitée, mais ce sont aussi des vendanges manuelles et aucun intrant lors de la vinification, sauf des sulfites, mais le moins possible : max 30 mg/L pour le rouge et 40mg/L pour le blanc versus 150 à 200 dans le conventionnel et même dans le bio. Bien sûr, ce sont des maxima… En réalité, on est souvent plus proche de 20, 10 voire 0 sulfites ajoutés !
Le résultat est frappant. Rien à voir avec les « vins morts », comme on les appelle parfois avec Baptiste.
Les vins naturels reflètent le millésime, le terroir, le cépage, la patte du vigneron. Ce sont des vins différents gustativement, qui ne trichent pas, qui ne mentent pas. Des vins beaucoup plus sur le fruit, sans cette parkérisation qui veut qu’un bon vin doit être boisé et sur-tannique. Des vins à haute buvabilité. Des vins avec lesquels il est impossible d’avoir mal à la tête. Des vins qui, by the way, font vivre des hommes (et des femmes) et non une industrie. Des vins de plaisir, mais aussi des grands crus, en appellation d’origine contrôlée.
Comment la gamme de vins naturels de Sequoia a-t-elle été élaborée ?
Baptiste – Il y a eu plusieurs réunions, avec les responsables des différents magasins, plusieurs échanges, et au final, la volonté de Sequoia était de réunir plusieurs fournisseurs autour d’un projet commun de valorisation du rayon vin, avec notamment toute une gamme de vins naturels. L’idée était de proposer des vins naturels répondant à plusieurs critères et pouvant plaire au plus grand nombre de clients, tout en respectant le travail de Sequoia et le chemin déjà fait jusqu’à aujourd’hui. Pour aider les clients dans leur choix, nous avons aidé à créer une échelle facile à décrypter pour chaque vin (sec, fruité, puissant complexe), ainsi que quelques mots sur chaque vin et enfin l’un ou l’autre conseil pour un accord réussi. Cela permet de se laisser guider, il n’y a plus qu’à déguster !
Matthieu – Toute la problématique a été d’établir une gamme qui respecte un certain cahier des charges : en plus de la certification bio et de la garantie d’absence d’intrants, il fallait arriver à des vins qui ne soient pas trop typés « nature ». L’ objectif de Sequoia, c’est d’amener les gens vers des produits vraiment sains, mais sans trop les dérouter ni les perturber. Les vins naturels doivent pouvoir être appréhendés pas à pas. Ici, pour démarrer, on s’est focalisé sur des classiques du vin naturel, des entrées de gamme qui permettent de comprendre à quel point c’est meilleur, sans devoir être, loin de là, un expert en vin. On s’y est donc mis à deux, Baptiste et moi, pour essayer de trouver, parmi les cuvées de nos vignerons respectifs, quels étaient les vins les mieux à même d’initier les clients de Sequoia au nature.
L’une ou l’autre recommandation ou coup de cœur ?
Baptiste – En blanc, je choisirais le Chenin 2014, domaine des Hauts Baigneux, Touraine Azay le rideau. Un magnifique Chenin, vif tendu et minéral aux notes parfois d’amandes séchées et de fruits secs, issu d’un superbe terroir aux sols calcaires. Idéal pour vos plateaux de coquillages et crustacés, votre poisson ou même pour de beaux fromages affinés à pâte dure.
En rouge, j’irais vers le Bourgueil 2014 « les Marquises », 100% Cabernet franc, domaine des Tètes. Un Cabernet franc mûre sur des notes de fruits noirs, légèrement poivré, un vin fruité et digeste mais pas que, il ne se démontera pas devant un plat de viande mijotée ou même de gibier à plumes très agréable et subtil. Et puis pour les bulles, mon coup de cœur absolu est le Champagne Pierre Gerbais, délicieux assemblage de 50% Chardonnay, 25% de Pinot blanc et 25% de Pinot noir. Juste magnifique !
Matthieu – J’irais spontanément vers le Cheverny Blanc d’Hervé Villemade. Parce que c’est un beau Cheverny, élevé avec très peu d’intrants. Parce que c’est un grand vin blanc, équilibré, sur le fruit. Ou alors j’opterais pour le Franc Tireur. Parce qu’on est en Roussillon, avec toute la puissance de ce cépage terreux, paysan, qu’est le Carignan. Et qu’au final on a une bouche pleine de fruits, sans astringence. Ou encore pour les fêtes, le Blanc de noir & Gris de Jean-Pierre Frick en Alsace, c’est surprenant à quel point on évite la sucrosité et on va à l’essentiel, le plaisir…
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